Les curiosités du village

1-Le Tonkin

La maison basse, nichée sous les platanes sur la route de Lézignan, la première maison à l’entrée de Luc, c’était Le Tonkin. C’était un affenage, doublé d’un petit café. Mais, c’était plus que cela : une maison close où quelques filles exerçaient le plus vieux métier du monde.

Quelques hommes du village et surtout des charretiers y faisaient halte. Les charretiers étaient des gens pressés et généralement peu fortunés. Aussi, pour faciliter leurs ébats, simplifier le service et leur offrir ce que l’on appelle aujourd’hui des « prix très étudiés », il y avait deux façons de consommer. La première, la plus classique, et la plus chère aussi, c’était d’accompagner ces dames dans leur chambre, tout bonnement.

Mais les impécunieux avaient la possibilité de les suivre dans l’affenage, où, pour une somme plus modique, ils avaient accès à un foudre défoncé garni de paille (authentique). Ô époque presque mythologique où Bacchus et Cérès faisaient le lit de Vénus !

Le 3 Juin 1900, l’Orbieu, enflé par de gros orages se permit une crue foudroyante.

Ses flots furieux quittèrent son lit et submergèrent la campagne environnante. L’eau arriva jusqu’au « Tonkin » et inonda le rez-de-chaussée (il n’y avait pas d’étage).

On dut évacuer les occupantes. Une haute charrette put arriver près du « Tonkin ». Des volontaires prirent ces demoiselles sur leur dos et amenèrent leur tendre fardeau sur la charrette salvatrice. À leur arrivée sur la terre ferme, ces dames étaient attendues par de nombreuses femmes du village qui soupçonnaient leurs maris d’avoir eu la promesse de récompenses en nature pour le sauvetage.

C’est sous les huées et les injures, que s’effectua le débarquement.